Clôture AG SIRTI / 2 avril 2019
Bonjour à tous,
Je serai bref, je débuterai par quelques mots d’accueil pour introduire ce moment que nous voulons convivial et agréable placé sous le signe des territoires, de tous les territoires dont ceux encore à conquérir. Je vous remercie, monsieur le Président du CSA, cher Roch-Olivier Maistre. Comme vous le voyez autour de vous, autour de nous, les radios indépendantes sont très largement représentées et nos adhérents sont impatients de vous entendre. Votre mandat à la Présidence du CSA débute dans une période charnière et complexe, mais aussi, et c’est – je pense – ce qui la rend formidable à vivre, faite de transformations technologiques et sociétales. Je salue également la présence de madame Aurore Bergé, Députée des Yvelines et rapporteure de la « mission d’information sur une nouvelle régulation de la communication audiovisuelle à l’ère numérique ». Des propositions concrètes qui jettent un regard neuf et qui n’hésitent pas à bousculer l’ordre établi. De nombreuses voix s’en sont d’ailleurs émues… c’est plutôt bon signe quand on a compris que l’attentisme ne profite pas à l’intérêt de la collectivité. Chère Aurore, vous nous aviez fait l’honneur de votre présence l’an dernier, nous éclairant de vos avis et pensées, je suis impatient de vous entendre de nouveau. Un an s’est écoulé et la situation évolue très vite. Rappelez-vous, nous parlions du DAB. Qui aurait pu prévoir ce que nous avons vécu ces dernières semaines ? Nicolas Curien peut-être… Un parlement bien représenté notamment par monsieur Bruno Studer, député du Bas-Rhin et Président de la Commission des Affaires Culturelles dont je remercie la présence, je sais que vous êtes attachés aux territoires, je suis donc particulièrement heureux de vous savoir dans l’assistance. Je salue l’ensemble des membres du CSA et les conseillers présents, nos confrères et partenaires qui nous honorent ce soir de leur présence. Enfin, je vous remercie Monsieur le ministre de la Culture, Franck Riester, d’être présent à nos côtés. À l’aune de la réforme de la loi de l’audiovisuelle, nos adhérents sont impatients de vous entendre.
Merci à tous d’être là pour parler de la radio, de son avenir – avec les radios indépendantes – à l’occasion de cette cérémonie de clôture de l’Assemblée Générale du Sirti.
« La radio c’est la voix, c’est la proximité, c’est cette voix qui vient vous parler dans le creux de l’oreille, partout où vous êtes, à n’importe quel moment de la journée… ».
Ce sont vos mots, monsieur le Ministre de la Culture, spontanés et justes. Une bien belle définition de la radio. Il m’a semblé sympathique d’illustrer l’introduction de notre assemblée avec car ici, ce soir, elle prend tout son sens.
Nos adhérents ont voulu placer ce rendez-vous sous le signe de l’intérêt général. Nous ouvrons les bras à toutes celles et ceux qui souhaitent avancer sur les sujets qui fâchent. Il est en effet temps d’engager un dialogue pour nous permettre de dépasser les querelles de principe avec pragmatisme et bonne volonté.
Parlons du projet d’ouverture des secteurs interdits de la publicité ou de la modification des règles de la publicité segmentée. Ne laissons pas des intérêts partisans ou les affirmations gratuites de ceux qui en seraient les premiers bénéficiaires, nous conduire à ignorer les conséquences que cette évolution – brutale et sans retour possible – aurait sur le paysage radiophonique dans son ensemble. Sommes-nous soumis à trop de contraintes règlementaires ? Oui, et il faudra y remédier dans bien des domaines. Mais gardons à l’esprit que les règles actuelles cimentent 50% des recettes de la radio privée en France. La radio privée, contrairement à tant d’autres, n’est pas un secteur aidé par l’argent public, faisons-en sorte qu’elle ne le devienne pas.
Parlons également des quotas : Oui, les radios – et les radios indépendantes – ont besoin de l’industrie musicale et réciproquement. Oui, les radios pensent que la chanson française fait gagner des auditeurs quand elle répond à la promesse éditoriale du programme. Oui, les programmateurs ont une vraie raison pour diffuser 10 fois par jour les mêmes chansons. En 75 minutes d’écoute quotidienne, malgré tous les plafonnements des rotations, un auditeur ne pourra pas écouter plus de 20 chansons, et si vous voulez qu’un tube naisse, il faut que le public puisse l’entendre, encore et encore. N’oubliez pas que les programmateurs sont aussi des artistes, et qu’ils aiment la musique. Alors oui, les quotas ont leur utilité mais comment une loi antérieure à l’invention du mp3 pourrait-elle encore répondre aux besoins d’un monde en révolution permanente ? La radio est le premier prescripteur de musique et de nouveaux talents. La radio fait donc légitimement partie de la filière musicale et nous sommes impatients d’être invités à participer activement au Centre National de la Musique dont vous avez, monsieur le Ministre, lancé les travaux préparatoires, il y a quelques jours. J’ai aimé votre discours ce jour-là, notamment quand vous avez insisté sur le besoin de mettre les artistes au centre du projet. Oui, les artistes français sont source d’audience. Et ils ont besoin d’être soutenus alors que les plus grandes plates-formes de streaming musical ont décidé de s’allier pour résister à l’amélioration de leur rémunération.
Parlons de ces plateformes de musique en ligne et de la concurrence déloyale qu’elles imposent aux radios. Pas de règles, pas de quotas, et pourtant elles dupliquent le modèle de la radio. Sur les offres gratuites, vous avez de la musique entrecoupée de publicité. Certaines appellent même ces programmes « radio ». Le Directeur Général du SNEP disait récemment dans la presse que ces plateformes ne nécessitaient pas de quotas car l’usage n’était pas le même. Sur une plateforme, quand un titre ne plait pas, l’auditeur peut le zapper contrairement à la radio. Je vais vous apprendre quelque chose, à la radio aussi les auditeurs peuvent passer à la chanson suivante, ça s’appelle le zapping. Respectons les auditeurs, les radios n’en sont pas propriétaires.
Le numérique, c’est aussi de grandes satisfactions avec le DAB. La France, sous l’impulsion des services du CSA et de l’engagement personnel de monsieur le Conseiller Nicolas Curien, rattrape enfin son retard. Les radios indépendantes – elles sont déjà 71 à diffuser en DAB – y souscrivent pleinement et sont très heureuses d’avoir, par leur engagement, permis le franchissement du seuil de 20% de population couverte avec les conséquences positives que l’on sait. Dans un an, les puces DAB seront présentes partout, dans tous les récepteurs de radio. Le DAB+, c’est aussi le maintien du modèle Broadcast et de la souveraineté de l’État par la régulation liée à l’octroi des autorisations d’émettre. La radio hertzienne reste libre, gratuite et anonyme ; indépendante des opérateurs de télécommunication et des GAFAs. Si elle n’existait pas déjà, on pourrait même considérer ces avantages comme un progrès face à un Internet toujours plus invasif et – sur ce plan, à ce jour, vous ne me contredirez pas monsieur le Président – sans régulation.
J’ai lu récemment un très beau texte qui soulignait que « les géants sont devenus des ogres », la référence ne vous aura pas échappée, prenons garde qu’ils ne dévorent pas également nos radios françaises. Il y a 20 ans, la presse s’est fait piller ses contenus au nom de la liberté, elle y a perdu ses lecteurs, ses sources de revenus et a été littéralement décimée. Après l’internet des écrans, arrive l’internet des oreilles. Les enceintes connectées auront, là encore, besoin de contenus. Quelle meilleure source que les radios pour alimenter ce qu’on appelle déjà « la radio délinéarisée » ? Comment serons-nous protégés ? Nos droits d’auteurs seront-ils reconnus ? Les travaux de l’Europe et les derniers textes sont encourageants mais il reste encore des progrès à accomplir pour reconnaitre à la création radiophonique toute sa place.
Je terminerai par le thème de cette Clôture : « les radios indépendantes, la voix des territoires ».
Le tropisme parisien a tendance à fausser le regard porté à la France au-delà de la francilienne. Car quand on pense médias en région, on pense d’abord à la PQR alors qu’il y a aussi, bien évidemment, la radio. Si elles ne sont pas toutes locales ou régionales – nous avons également dans nos rangs des thématiques nationales et même une généraliste –, nos radios exercent souvent au plus proche des territoires et se font l’écho des préoccupations de nos concitoyens. Il y a toujours un micro tendu pour donner la parole. Il est vrai qu’on entend beaucoup de doléances sur ceux qui se considèrent comme des abandonnés de la république, sur la désertification administrative ou l’absence de service public mais fort heureusement, nous comptons également des optimistes parmi nos auditeurs pour lesquels le bien vivre ensemble est essentiel. Partout, la radio maintient un lien social, souvent très fort. Avec le mouvement des gilets jaunes et à un an des élections municipales, il nous a semblé important de demander à l’Ifop de réaliser une étude que nous présentera Isabelle TREVILLY dans quelques minutes, intitulée : « Médias en régions : Les Français et les radios des territoires ». Les résultats confirment le rôle clé de la radio dans une époque ou la voix des Français doit s’exprimer.
Car « La radio c’est la voix, c’est la proximité, c’est cette voix qui vient vous parler dans le creux de l’oreille, partout où vous êtes, à n’importe quel moment de la journée… », ce sont vos mots monsieur le ministre. La radio c’est la voix, je ne souhaite qu’une chose, qu’elle n’arrête jamais de parler.
Merci à tous